Script du témoignage de Patrice
Extrait du film"Infection à VIH : Témoignages sur les trithérapies "
Auteur : Catherine Tourette-Turgis, Réalisateur : Pierre Attia,
Producteur
: COMMENT DIRE (VHS 52 min.)
© 1998, Comment Dire

 

On m'a mis en bithérapie sans information, donc c'était comme quelque chose que j'ai vécu assez durement finalement parce que je me suis retrouvé à un moment à l'extérieur de l'hôpital, je me suis assis sur un banc et là, j'ai réalisé que la maladie rentrait dans ma vie.

Je suis séropositif depuis 91, bon je n'ai pas déclenché de maladies opportunistes sauf quelques bricoles dermatologiques, bon que tout séropo peut avoir. Je suis sous trithérapie depuis novembre 96. A ce moment là, je suis rentré chez ma copine et elle, elle a … j'ai posé le sachet de médicaments sur la table et elle, elle n'a pas réagi, elle a, elle n'a eu aucun mot je veux dire, c'était assez étrange comme réaction, enfin c'est comme ça.

Moi je pense, enfin les médicaments m'ont rendu plus malade que le SIDA. Et je vais vous montrer ce que je prends dans une journée. Ça à 7h le matin, ça à midi, ça à 18h, ça pendant le dîner et ça à 23h. Bon celle-là est plus difficile à prendre parce qu'effectivement il faut la faire fondre. Quand on est à l'extérieur c'est pas facile, quand on la croque, il faut avoir de l'eau sur soi ou alors il faut aller dans un bistrot et ça nous coûte assez cher.

Quand on me les as donnés [les médicaments] on ne m'a pas vraiment donné le mode d'emploi, le seul mode d'emploi qu'il y avait, c'était celui qui était dans la boîte.

Non, j'ai pas oublié de prise, je n'ai pas oublié de prise mais je veux dire c'est très contraignant. Mais maintenant, ils ont fait, ils font partie intégrante de ma vie que je le veuille ou non de toute façon.

Avec mon amie, on avait monté un petit commerce et arrivé là, enfin moi je m'occupais de la gérance et à un moment je me suis… j'étais plus bon à rien, en fait. Avec ce problème des médicaments donc je n'arrivais plus à me lever le matin, je ne me déplaçais pas, en fait je ne faisais plus rien, je ne faisais plus rien et un jour je suis parti à cause de ça, quoi.

Les effets secondaires que j'avais, c'est diarrhées, vomissements, enfin c'était impossible et c'est ce que j'ai dit tout à l'heure, ça m'a vraiment… ça m'a même, ça m'a même contraint à la séparation en fait… cette histoire.

Je n'étais pas prêt à les prendre en fait, enfin d'un point de vue psychologique, je n'étais pas du tout prêt.

Donc je n'ai plus cette vie que j'avais avant qui était vraiment sans horaires, maintenant je suis rivé à un chronomètre. En fait, le problème de la séropositivité, c'est d'être disponible pour ça. Il faut avoir du temps pour s'en occuper, connaître les consultations, connaître le bras thérapeutique qui va convenir, connaître tous les, enfin je veux dire les… comment remplir ces formulaires administratifs, ça devient un métier à part entière.

Les rencontres sont toujours très difficiles avec les femmes, dans la mesure où il y a bien un moment où il faut annoncer sa séropositivité.

Pour moi le désir d'enfant ce serait, quand même, avoir une continuité quelque part. Pas partir sans… Comme ça…

En fait, ce qu'il manque dans toutes ces histoires de SIDA, c'est de l'amour. C'est assez contradictoire d'ailleurs, enfin je ne sais pas. Parce que c'est par là que j'ai été contaminé, à cause de l'amour.
Parce que, je veux dire, la molécule, ça suffit pas.